Il s’agit de un tournant. Tous ceux qui trouvent difficile la performance pénétrante et souvent froide de Tilda Swinton (oui, il y en a) devraient s’éloigner le plus possible de « La fille éternelle ». Le reste d’entre nous peut profiter de 96 minutes de sa révélation Bowie-esque (période Thin white duke) – dans un programme double.

Elle y joue à la fois la fille éternelle et la mère grisonnante qui va passer quelques jours dans la maison familiale de sa mère, devenue un hôtel. La réceptionniste arrogante ne les laisse pas choisir une chambre, bien que l’hôtel semble vide. D’autres bizarreries s’accumulent au fur et à mesure que la fille et la mère tentent de se rejoindre. La fille, en particulier, qui dorlote sa mère, fait preuve d’une abnégation névrotique et dépend profondément des encouragements de sa mère.

British Joanna Joanna Hogg est une auteure acclamée dans son pays d’origine, surtout après sa percée « The souvenir », un drame largement autobiographique sur une cinéaste en herbe (interprétée par Honor Swinton Byrne – oui, la fille de Tilda) qui s’enlise dans une relation destructrice – un film qui n’a jamais eu de sortie au cinéma en Suède (ni la suite). Le film « The eternal daughter » suit le même chemin, directement sur l’étagère du streaming numérique.

Si « Le souvenir » avait des traits hitchcockiens, le film de Hogg se rapproche davantage du thème de la maison hantée, avec des éléments tels qu’un visage blanc soudain à la fenêtre, des craquements et des bruits sourds provenant de pièces prétendument inhabitées. La présence d’un mort au coin de l’œil.

Le dialogue est cassant, finement ciselé et dérive à travers de nombreux moments sensibles. La caméra peint des landes grises, des maisons en pierre usées et une nature qui palpite doucement.

Mais c’est l’interpersonnel qui marque le plus. Il s’agit de vieux secrets et de cicatrices mentales et, à la fin, il s’avérera que c’est un métadrame dans le temps qui éclaire les ténèbres dont nous venons d’être les témoins.

Egalement ceci serait une création autobiographique. Joanna Hogg semble sans aucun doute avoir eu une vie passionnante, ou bien elle est tout simplement exceptionnellement douée pour animer et représenter la vie. Et puis elle a Tilda Swinton.